Historiques

Le Lit clos

Chronique de Le Lit clos, de Sophie Brocas.

« Voilà plus de trois semaines que les sardinières ont cessé le travail, que les marins ne sortent plus. Douarnenez est comme gelé. Seule les danses improvisées sous la halle redonnent foi dans la lutte »

Sophie Brocas, Le Lit clos, Mialet-Barrault Éditeur, 2025, p. 113.

Motivations initiales

J’ai découvert ce livre un peu par hasard sur les réseaux. Bon, il faut dire que son sujet est assez méconnu, voire inconnu, du grand public. Mais mon attachement au pays bigouden et plus particulièrement à la petite cité reine de la sardine – Douarnenez – fait que je connais bien cette grande grève féminine de 1924. Pour mémoire, j’ai lu sur le sujet, il y a quelques mois, un ouvrage qui m’avait captivé, à bon entendeur ! 

Synopsis

1924. Douarnenez, pays bigouden. Les femmes sont en colère aux portes de l’usine de sardines. Elles estiment être trop peu payées et être largement exploitées par les patrons qui ne respectent pas les lois du travail. Elles entament donc une grande grève, qui va paralyser la ville entière. 

Rose, jeune paysanne qui travaille à l’huilage à l’usine pour aider son père à nourrir la famille, découvre un monde d’entraide, un monde de femmes qui, en l’absence du mari, parti en mer, doivent assurer la survie. Happée par les idées des « rouges », elle entre en lutte aux côtés de Louise. 

Louise, c’est cette femme que rien ni personne n’effraie, cette femme qui tient tête au patron, au maire de la ville et qui est convaincue que la femme est l’égal de l’homme, pas une inférieure que l’on peut manipuler et exploiter à loisir. 

Au milieu de cette lutte féminine, Rose et Louise vont découvrir que l’amour n’est pas uniquement entre un homme et une femme mais qu’il est également possible entre deux femmes. Mais cet amour, si beau, si pur, pourrait signer leur perte…

Avis

Ce livre passe – malheureusement – assez inaperçu sur les réseaux et quel dommage ! Sophie Brocas nous embarque dans un grand moment de l’histoire des femmes, qui reste assez méconnu, celui de la grève de 1924 des Penn Sardin de Douarnenez. L’auteure dresse un portrait tellement fidèle que l’on sent, au fond de nos tripes, la pénibilité du travail des femmes, la colère qui gronde avant d’éclater au grand jour. On y est, on est aux côtés de Louise et de Rose, à espérer des lendemains de fête, des lendemains où les femmes pourront choisir leur existence. 

L’auteure nous livre ici un texte furieusement militant. S’il aborde la grève de 1924, il aborde également la question des interdits – ici, une histoire d’amour entre deux femmes -, le poids du regard de la société, et les injonctions de la société – « pour être une vraie femme, il faut mettre un enfant au monde ». Cent ans nous séparent de ce texte et pourtant, force est de constater que la situation, même si elle a connu bien des évolutions, demeure sur bien des sujets extrêmement fragile. 

Le Lit clos, c’est un roman qui se vit autant qu’il se lit. Ce roman historique est un coup de fouet pour ceux qui s’y plongeront, c’est âpre et pourtant ça regorge de poésie. Ce roman historique renvoie à l’austérité de ces femmes vêtues de leur grande robe noire et de leur coiffe.

Un seul regret ? Devoir quitter si abruptement Louise et Rose mais cette rapidité, ce côté abrupt reflète bien leur rencontre. Chut, je vous laisse découvrir…

Louis et Rose, Rose et Louise, deux femmes, deux vies, deux choix. Ma première grosse claque littéraire de 2025, c’est à Sophie Brocas que je la dois, merci, merci pour ce moment si intense.

Pour en savoir plus

Retrouvez la présentation de ce livre sur le site de l’éditeur.

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