Chronique de Nettle and Bone – Comment tuer un prince, de T. Kingfisher.
« La poule brune apparut sur le côté de la maison, aperçut Chien d’os et fonça sur lui comme un général à la tête d’une armée. Elle piqua sa queue d’un coup de bec et déclencha un jappement fantomatique. Chien d’os se redressa sur ses pattes, perplexe, et la poule s’enfuit avec un caquètement triomphal. »
T. Kingfisher, Nettle and Bone – Comment tuer un prince, Éditions du Seuil – Verso, 2024, p. 112.
Motivations initiales
Ce livre a pas mal circulé sur les réseaux sociaux. Ce qui est toujours intrigant, parce qu’on ne sait en général pas vraiment plus quoi en penser. Mais comme il a également été favorablement évoqué par notre libraire préférée… nous l’avons demandé à Verso. Et ils nous ont fait le plaisir de nous l’adresser. Cela méritait que nous le lisions assez vite… nous avions déjà mis suffisamment de temps à nous décider à nous y intéresser…
Synopsis
Marra a deux sœurs aînées. Damia, la plus grande, et Kania. Autant elles s’adorent, avec Damia, autant elles se détestent, avec Kania.
Toutes les trois sont également des princesses. D’un petit royaume presque insignifiant – le Royaume du Port -, coincé entre ses deux grands voisins, le Royaume du Nord et le Royaume du Sud, dont chacun pourrait sans difficulté l’écraser. Pour survivre, il faut ruser, négocier, jouer l’un contre l’autre.
Jusqu’au jour où Vorling, le prince du Royaume du Nord, épouse l’aînée, Damia. L’avenir du royaume semble assuré… au moins jusqu’à ce qu’un futur héritier n’incorpore le Royaume du Port dans le Royaume du Nord… Mais Damia meurt. Pour ne pas perdre cette alliance, c’est Kania qui se retrouve à épouser Vorling.
Marra, elle, ne doit surtout pas donner d’héritier qui pourrait contester celui que Kania pourrait donner à Vorling. Elle se retrouve donc envoyée dans un couvent. Ce qui, il faut être honnête, l’arrange bien : elle n’a que faire des charges d’une princesse, cela ne l’intéresse pas, elle n’a jamais compris ce qui était attendu d’elle.
Mais, lorsqu’elle retrouve Kania, finalement, Marra finit par comprendre que Vorling est un monstre, et que sa sœur risque, elle aussi, d’y laisser la vie. Pas d’autre solution : il faut tuer le prince. Mais comment tue-t-on un prince, quand on est une princesse et qu’on ne sait ni manier les armes, ni rien d’autre d’ailleurs qui puisse tuer quiconque ?
Avis
Ce livre, disons-le d’entrée, a les défauts de ses qualités, et réciproquement. Il est décalé, positivement et négativement. Les personnages sont atypiques, et c’est plutôt agréable : cette princesse qui ne sait pas faire grand-chose de ses dix doigts, qui se retrouve investie d’une mission dont elle ne voit pas du tout comment elle pourrait la remplir – elle sait qu’elle n’est pas une héroïne.
Voilà donc Marra sur les chemins, à accomplir des tâches impossibles – donner vie à Chien d’os, par exemple, qui porte ce nom parce qu’il a été constitué avec des ossements de chiens, tisser une cape en toile de hibou et en laine d’ortie… Quant à la troisième tâche, il lui faut enfermer le clair de lune dans un pot d’argile. Elle est accompagnée de personnages tout aussi impossibles : une dame-poussière, sa marraine – vous savez, celle qui se penche sur le berceau des enfants pour leur offrir des dons… mais celle-ci ne sait offrir que des malédictions -, un chien d’os, donc, une poule possédée par un démon.
En fait, tout est « un peu trop ». Comme si l’auteure s’appliquait à faire original, hors du commun. Mais que cela sentait la sueur et l’effort. Là où on voudrait se dire « c’est malin », on se dit « c’est forcé ».
Et pourtant, on se laisse tout de même entraîner dans ce récit. Et les situations s’enchaînent. Rien n’est imprévisible, mais on ne se dit pas non plus « je le savais ». Bref, c’est une lecture curieuse, amusante, pas désagréable, mais qui laisse un goût un inachevé.
Pour en savoir plus
Retrouvez la présentation de ce livre sur le site Place des libraires.
Ô grimoire ! 