Chronique de Crâne d’os, de Mo Hayder.
« Il y avait un mot écrit à la bombe sur le tronc. Difficile à déchiffrer tant l’écriture était irrégulière.
DÉGAGEZ.
La gorge serrée, j’ai été traversée d’un frisson. »
Mo Hayder, Crâne d’os, Les Presses de la Cité, 2025, p. 277.
Motivations initiales
J’avais à peine dix-huit ans quand j’ai découvert Mo Hayder. Cette auteure m’a filé mes premières sueurs froides en lisant des polars. Il était évident que j’allais me plonger dans ce thriller publié à titre posthume.
Synopsis
Crâne d’os de Mo Hayder nous entraîne dans les brumes des Cotswolds, au cœur d’un village qui cache plus de secrets que de ruelles pavées.
Depuis qu’elle a échappé à un drame que personne n’a vraiment compris, Alex Mullins tente d’oublier. Mais certaines nuits, l’ombre revient : celle d’une femme au visage arraché, une silhouette qu’on murmure être « Crâne d’os », une prostituée atrocement tuée il y a un siècle. Une légende, disent-ils… Mais Alex sait ce qu’elle a vu.
Avec Arran, son ami de toujours, elle rouvre les blessures de cette nuit maudite pour dénouer les fils emmêlés entre passé et présent. Plus ils fouillent, plus le vernis tranquille d’Eastonbirt se craquèle — et derrière, se cachent des vérités bien plus terrifiantes qu’un simple fantôme.
Quand la légende se fait chair et que la peur s’invite à nouveau dans leurs vies, Alex comprend que parfois, ce ne sont pas les morts qu’il faut le plus redouter.
Avis
Mo Hayder, c’est un nom gravé dans ma mémoire depuis mes 18 ans. Elle a été la première à m’entraîner dans cet univers où la peur est un fil qu’on déroule page après page, tout en sachant qu’il nous mènera forcément quelque part où l’on préférerait ne jamais aller. Comme pour beaucoup, Tokyo a été pour moi une claque : glaçant, inoubliable, impossible à refermer sans y penser encore des années plus tard.
Alors forcément, plonger dans Crâne d’os, c’est retrouver cette sensation unique : celle de sentir le malaise ramper dès les premières pages. Ici, tout commence dans un village anglais comme on les imagine : des collines, des sous-bois, des habitants persuadés que certaines histoires devraient rester enterrées. Et pourtant, tout remonte à la surface, forcément.
Une silhouette fantomatique sur une photo qu’on n’est pas censé avoir, une forêt où disparaissent d’abord des chiens, comme un avertissement — puis cette vieille légende d’une prostituée assassinée qu’on murmure encore à la sortie du pub. Et au milieu de tout ça, Alex, notre héroïne, survivante d’un drame dont elle porte encore les cicatrices invisibles, et Arran, son ami d’enfance, qui l’accompagne malgré la peur.
Ce que j’adore dans ce roman, c’est que Mo Hayder ne se contente pas d’écrire un simple thriller. Elle installe une ambiance — poisseuse, brumeuse, presque organique. Ici, on ne sursaute pas toutes les deux pages : on frissonne tout du long, on scrute l’ombre derrière la porte, on se surprend à tendre l’oreille comme si quelque chose rampait derrière nous.
Crâne d’os mélange la terreur psychologique et la noirceur de l’humain, comme l’auteure a toujours si bien su le faire. Les vieilles légendes s’invitent dans la réalité, la mémoire qu’on croyait figée ressurgit, la vérité se dérobe, se cache, se salit. Et on tourne les pages, de plus en plus vite, en se demandant ce qui est pire : la légende ou ce que les vivants sont capables de faire pour qu’elle devienne bien réelle.
Et puis, il y a ce décor : ces sous-bois un peu trop calmes, ces chemins où l’on n’entend plus que ses propres pas, ces sorcières de contes qu’on invoque à mi-voix pour expliquer ce qu’on ne veut pas voir en face. Mo Hayder maîtrise l’art de réveiller nos peurs primales : celle du noir, du bruit qui craque, de ce qu’on ne voit pas mais qu’on sent quand même.
Un polar psychologique oppressant, fascinant, qui joue avec la frontière entre mythe et réalité, entre souvenir et cauchemar. Parfait pour frissonner cet été à l’ombre des arbres — à condition de ne pas entendre de pas derrière soi. Vous voilà prévenus…
Pour en savoir plus
Retrouvez la présentation de ce livre sur le site lisez.com.

