Chronique de Les Bouchères, de Sophie Demange.
« Elles tuaient le bourreau, l’humiliant, l’incestueux, le menteur, l’indigne. Elles vengeaient. Elles aimaient la sensation de la chair sous leurs mains. Le son de leurs couteaux sur le fusil à aiguiser rythmait leurs gestes. »
Sophie Demange, Les Bouchères, Éditions L’iconoclaste, 2025, p. 212.
Motivations initiales
Une amie m’a recommandé ce livre… Au départ, j’ai hésité car la cover ne m’inspirait pas et puis lors d’une virée en librairie, j’ai craqué !
Synopsis
À Rouen, impossible de passer à côté de leur boutique : une devanture rose bonbon, des rires qui fusent, et l’écho sec des couteaux qui taillent la viande. Les Bouchères, ce sont trois femmes puissantes et inséparables, musclées par le travail, fières de leurs ongles pailletés et de leur force brute. Derrière le billot, elles forment une meute silencieuse, liée par une enfance cabossée, une adolescence furieuse… et un secret qu’on ne partage pas.
Mais quand les notables du quartier bourgeois commencent à disparaître mystérieusement, les regards changent, les ragots s’emballent, les menaces s’accumulent. Et les Bouchères, jusque-là figures du folklore local, deviennent les cibles désignées d’une chasse aux sorcières moderne.
Avis
Il y a des romans qui vous prennent par surprise, qui vous happent dès les premières pages et ne vous lâchent plus. Les Bouchères de Sophie Demange fait incontestablement partie de cette catégorie. Dans un premier roman audacieux et intense, l’auteure nous plonge dans l’univers singulier de trois femmes qui n’ont rien à envier aux plus grandes héroïnes de la littérature noire.
La relation entre ces trois femmes est d’abord énigmatique, mais leur complicité, aussi solide qu’une lame bien aiguisée, prend de la profondeur au fur et à mesure que l’intrigue se déploie. Ce n’est pas juste une histoire de femmes qui gèrent une boucherie, c’est un récit de sororité, de secrets partagés et d’indépendance. Les Bouchères sont des personnages puissants, authentiques, et plus que jamais, elles incarnent cette force féminine qui traverse le roman.
Mais l’intrigue ne se résume pas à une simple chronique de la vie des Bouchères. Lorsqu’une série de disparitions mystérieuses secoue le quartier, les rumeurs se propagent, les ragots pleuvent et la police se retrouve sur leurs talons. C’est là que le roman prend toute sa dimension de thriller : la tension grimpe, l’atmosphère devient angoissante, et le lecteur ne peut s’empêcher de se demander : quelle est la part de vérité et quel est ce secret qui les unit ?
Ce qui frappe le plus dans ce roman, c’est la manière dont Sophie Demange parvient à tordre un genre qu’on pourrait croire bien connu – le roman noir – pour y insuffler une force féminine nouvelle et inattendue. Elle signe ici un premier roman maîtrisé, où la plume est à la fois tranchante et sensuelle, fluide et nerveuse. On ne peut qu’admirer son regard acerbe sur la société et les dynamiques de classe, tout en appréciant la manière dont elle manie les codes du suspense – avec brio !
Un grand bravo à Sophie Demange pour ce premier roman qui, je n’en doute pas, marquera les esprits et fera parler de lui. Si ce n’est pas déjà fait, n’attendez plus pour découvrir Les Bouchères !
Pour en savoir plus
Retrouvez la présentation de ce livre sur le site Place des libraires.

