Roman noir

Toutes ses fautes

Chronique de Toutes ses fautes, de Andrea Mara.

« – Bonjour, désolée, je suis en déplacement en France, s’excusa la voix au téléphone. Je n’ai pas organisé d’après-midi jeux aujourd’hui. Jacob est chez Sarah Rayburn. »

Andrea Mara, Toutes ses fautes, Éditions Points, 2025, p. 19.

Motivations initiales

Le schéma classique : un retard de train, la Fnac au détour d’un chemin, j’ai craqué ! Bonne ou mauvaise idée ce craquage ?

Synopsis

Un après-midi apparemment banal, Marissa Irvine se rend au 14 Tudor Grove pour récupérer son fils Milo, invité chez un camarade de sa nouvelle école. Mais à la porte, ce n’est pas la mère qu’elle connaît qui lui ouvre. Ce n’est pas non plus une nounou. En fait, ce n’est pas la maison où habite le camarade de Milo. Et ce dernier ? Introuvable.

En un instant, le quotidien bien rangé de cette banlieue de Dublin bascule dans l’impensable : un enfant a disparu. Alors que l’enquête piétine, les soupçons se resserrent autour de quatre femmes au cœur du drame — voisines, amies, complices ou menteuses ? Toutes ont quelque chose à cacher. Toutes pourraient être coupables.

Dans cette petite communauté où tout le monde s’observe, chacun sait quelque chose, personne ne dit tout — et la vérité se cache derrière des portes soigneusement closes.

Avis 

Toutes ses fautes est typiquement ce que j’appelle un polar domestique bien huilé, calibré pour vous embarquer dès la première page et vous tenir éveillé jusqu’à la dernière. Andrea Mara sait exactement où appuyer pour faire naître l’angoisse : elle prend un élément du quotidien — un goûter d’enfant, un quartier tranquille, des mères qui se croisent aux grilles de l’école — et elle le fissure.

Dès que Milo disparaît, tout bascule : l’angoisse d’un parent, le sentiment d’impuissance, la paranoïa qui s’installe. Et surtout, cette question : jusqu’où connaît-on vraiment ses voisins, ses amies, soi-même ? L’autrice dissèque la dynamique d’un microcosme où tout le monde épie tout le monde, où chaque mot de trop peut devenir une rumeur et où chacun est prêt à détourner le regard si ça peut sauver les apparences.

Ce que j’ai apprécié, c’est la galerie de personnages féminins : quatre femmes, quatre façades impeccables, quatre passés qu’on devine fissurés. Andrea Mara joue à semer le doute sur chacune, lentement, page après page. La narration fait de nous des voyeurs : on fouille dans leurs secrets, on questionne leurs regards, leurs silences, leurs gestes anodins.

Le roman est efficace : la tension est maintenue, l’écriture est fluide, et le décor — une banlieue chic de Dublin — ajoute ce côté feutré qui rend l’intrigue encore plus insidieuse. On est loin du thriller sanglant ou du polar labyrinthique : ici, tout repose sur le non-dit, le faux semblant, la rumeur de couloir qui enfle.

C’est aussi ce qui, pour moi, constitue à la fois la force de ce livre, mais aussi sa limite. Pour ceux qui aiment les polars domestiques à la Liane Moriarty, ou le côté « secret entre voisins » à la Shari Lapena, vous y trouverez votre compte : un livre qui se lit tout seul, un vrai page-turner, un petit frisson du soir pour débrancher du quotidien. Mais pour les amateurs de thrillers plus sombres, avec du sang sur les murs et une noirceur psychologique qui laisse une trace longtemps après, ça peut paraître un peu trop sage. On tourne les pages avec plaisir, mais on n’a pas forcément ce choc final qu’on peut attendre quand on est fan de polars plus tordus.

Est-ce que j’ai passé un bon moment ? Oui, clairement. Est-ce que je m’en souviendrai longtemps ? Moins sûr. Mais parfois, c’est exactement ce qu’il faut : un suspense vite dévoré, qui fait le job sans nous laisser KO émotionnellement. Et ça, mine de rien, ça a aussi son charme.

Pour en savoir plus

Retrouvez la présentation de ce livre sur le site de l’éditeur.

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