Policiers, Psychologique, Roman noir, Thrillers

La Chair de sa chair

Chronique de La Chair de sa chair, de Claire Favan.

« À trente ans, après tant d’années passées à trimer, à galérer et à sécher ses larmes, elle peut enfin goûter à une existence presque normale. Son fils est grand et assez autonome pour que les services de l’enfance ne s’intéressent plus jamais à eux. Et elle compte bien jouir de la liberté que cela lui offre. Elle n’abusera pas, mais elle veut rencontrer des gens, sortir, profiter. »

Claire Favan, La Chair de sa chair, Pocket, 2022, p. 92.

Motivations initiales

Chaque année, nous avons déjà eu l’occasion de le dire, nous profitons de Quais du Polar à la fois pour rencontrer les auteurs que nous suivons déjà, et pour nous laisser convaincre par la découverte d’auteurs que nous n’avons pas encore eu l’occasion de lire. Ainsi, aucun de nous deux n’avait jamais rien lu de Claire Favan. Nous en avons donc profité pour échanger quelques mots, et repartir avec un de ses romans chacun…

Synopsis

Dans le comté de Winnebago, tout au nord de l’Illinois, quasiment à la frontière du Wisconsin, Moira O’Donnell semble faire partie de ces personnes qui ont tiré un mauvais numéro à la naissance. Sa mère ne s’est jamais réellement comportée comme telle. Son premier mari la battait, ce qui lui a valu de finir en prison, mais pas avant que leur fils, Peter, ne soit contraint de poignarder son père pour l’empêcher de frapper sa mère. Le père de ses deux autres enfants s’est suicidé, sans qu’aucun signe avant-coureur n’ait permis d’identifier son mal-être. Et voilà que sa fille, la petite dernière, Wendy, est atteinte de mucoviscidose.

Il n’en faut pas plus pour que les dettes s’accumulent. Moira se retrouve contrainte à accepter plusieurs boulots, tous mal payés, pour payer les factures et nourrir les enfants. Mais même cela ne parvient pas à l’abattre. C’est alors qu’une bonne âme, dans le quartier, se pique d’alerter les services sociaux, qui annoncent leur venue prochaine. Là encore, Moira parvient à détourner les coups du sort, en faisant appel à une voisine, qui accepte de venir assurer une présence, pour l’inspection surprise.

Mais quand les choses sont mal embarquées, il faut boire le calice jusqu’à la lie. Rentrant tard, un soir, Moira trouve Nigel, son deuxième fils, penché sur Wendy, appuyant un coussin sur sa tête. Trop tard, la fillette a cessé de respirer. Nigel, qui ne dit plus un mot, se retrouve interné en psychiatrie : la mission de l’équipe médicale est de déterminer s’il est pénalement responsable, car, aux États-Unis, d’un état à un autre, les enfants peuvent être jugés par les mêmes tribunaux que les adultes…

Moira se retrouve alors seule avec son fils aîné, Peter. C’est peut-être l’occasion de rebondir ?

Avis

Voilà un livre dont il est assez difficile de parler sans spoiler. Je vais donc tenter cet exercice délicat qui consiste à dire assez sans trop dire…

Commençons par le plus simple, et, après tout, par l’essentiel. L’auteure parvient à nous faire plonger dans cette histoire dès les premières pages, et à tenir le récit sur la crête tout au long du livre. Tout en ayant deviné rapidement l’un des points de bascule de l’histoire, la lecture est restée très efficace et intéressante. Donc, ça fonctionne, et même très bien !

On suit d’un côté Moira, qui, après avoir touché le fond, tente de rebondir. Après la mort de Wendy, elle tente de reconstruire son existence. Ayant réussi à obtenir un diplôme, elle trouve un travail plus stable, mieux payé. Avec Peter, son fils aîné, ils se serrent les coudes, notamment lorsque son premier mari, libéré de prison, tente de s’imposer à nouveau, et fait tout ce qu’il peut pour faire fuir tous les hommes qui approchent celle qu’il considère encore comme sa propriété. Le garçon, qui a été contraint à grandir trop vite, est heureusement un appui solide pour sa mère.

D’autre part, on suit les efforts de Bruce Thomas pour briser la coque de silence dans laquelle Nigel s’est muré. Mais Bruce n’est pas juste un psychiatre parmi d’autres : il est aussi le fils d’une brillante neuro-chirurgienne, dont il n’a pas comblé les espoirs. Elle espérait qu’il saurait se montrer digne de ses gènes, comme sa sœur et son frère, mais il n’est que psychiatre et, s’il vient d’obtenir un poste de directeur de département, c’est dans une obscure clinique… Bruce a donc ses propres failles, qui font de lui un personnage plein d’épaisseur.

Les deux fils de cette histoire, lorsqu’ils se nouent, sont naturellement imbibés de toutes ces violences, physiques et psychologiques, subies par tous les personnages de ce récit. Et, forcément, le résultat est explosif… mais c’est là où je ne veux surtout pas en dire trop ! Mais si l’on voulait résumer, on pourrait dire que l’amour est aveugle.

Alors, est-ce que vous êtes prêts à plonger, vous aussi, dans cette histoire sombre aux confins du Canada ?

Pour en savoir plus

Retrouvez la présentation de ce livre sur le site de l’éditeur.

1 réflexion au sujet de “La Chair de sa chair”

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