Chronique de Darnand, le bourreau français – T. 3, de Patrice Perna.
« J’ai été témoin de la vie de ce héros. Je l’ai vu avec une désinvolture incroyable, une élégance de seigneur, faire face au barbare allemand. Se comporter au combat avec un mépris souverain de la mort. Nous l’aimions tellement. Comment a-t-il cessé d’être un héros ? Si les politiciens et les généraux n’avaient jamais signé l’armistice, il aurait continué à tuer des allemands. Je ne leur pardonnerai jamais d’avoir privé la résistance de cet admirable compagnon d’armes, de cet admirable chef. »
Patrice Perna, Darnand, le bourreau français – T. 3, Rue de Sèvres, 2019, p. 35.
Motivations initiales
Les deux premiers tomes – Darnand, le bourreau français – T. 1, Darnand, le bourreau français – T. 2 – nous avaient déjà beaucoup plu. Alors il était logique de lire ce tome 3, en espérant que la qualité serait toujours au rendez-vous…
Synopsis
La guerre se termine. Un détachement de la milice, dirigé par Darnand, se rend en Italie. Ce n’est désormais plus qu’une question de temps avant l’effondrement définitif du Reich et de ses alliés. Finalement, Darnand abandonne ses hommes pour essayer de se sauver… mais il finit dans une prison, à attendre son jugement et sa probable condamnation à mort.
Ange, pour sa part, s’il a survécu, semble avoir perdu tout goût de vivre. Il demande finalement à aller rencontrer Darnand dans sa prison. Il veut savoir où se trouve Gombert…
Avis
> L’avis de T
Troisième et dernier tome de la série, c’est définitivement une grande réussite ! Bon, il faut dire que le personnage central, Darnand, est infiniment romanesque. Et ce d’autant plus que l’auteur le montre dans toute sa complexité – et plus encore dans ce dernier tome.
En effet, alors que l’ambigüité venait jusque-là essentiellement d’Ange, on découvre ici Bruckberger, un prêtre, qui, tout en reconnaissant la face sombre du personnage, fait partie de ceux qui l’ont connu comme héros – c’est lui dont les propos sont repris dans la citation en haut de page !
La dimension jusqu’au-boutiste, sans nuance, de Darnand est clairement mise en avant. Et cela rend ce personnage non pas attachant – évidemment non ! – mais on ne peut s’empêcher d’avoir une certaine admiration, même si elle est teintée de dégoût. Et cette idée que, si Pétain et les généraux n’avaient pas capitulé, Darnand aurait sans doute continué à se battre, jusqu’à l’ultime sacrifice, ne peut pas laisser le lecteur indifférent.
Ange, de son côté, n’est pas non plus décrit comme un héros pur et dur. Il a, lui aussi, ses parts d’ombre. Et l’on sent, intuitivement, qu’il aurait pu, lui aussi, basculer du mauvais côté. Cela le rend, là aussi, humain, juste humain, profondément humain. Et c’est déjà beaucoup !
Parmi les personnages secondaires, on retrouve des thèmes bien connus, mais qui trouvent ici une expression très réussie. Ainsi, autour de Gombert, on voit des miliciens qui, sentant le vent tourner, tentent de se draper dans les habits de la Résistance. Parmi les vainqueurs, certains donnent l’impression de vouloir bien vite oublier que, pendant la guerre, ils ont accepté des compromis…
Bref, c’est une humanité plutôt faible et corruptible que l’on voit graviter autour des deux rocs placés au centre de la série, Darnand et Ange… Et cela fonctionne vraiment bien !