Conte, Fantastiques, Roman

Malpertuis

Chronique de Malpertuis, de Jean Ray.

« Je suis entré dans Malpertuis, je lui appartiens, elle ne fait aucun mystère de son intérieur. Aucune porte ne s’y obstine à rester close, aucune salle ne se refuse à ma curiosité, il n’y a ni chambre interdite, ni passage secret, et pourtant…

Pourtant elle restera mystère à chaque pas, et elle entourera chaque pas d’une prison mouvante de ténèbres. »

Jean Ray, Malpertuis, Communauté française de Belgique, Collection Espace Nord, 2020, p. 60.

Motivations initiales

L’un de nous ayant – infructueusement – participé à l’un des appels à nouvelles des éditions Malpertuis, nous nous sommes intéressés à la raison du choix de ce nom. À notre grande honte, nous ignorions – ou croyions l’ignorer – l’oeuvre de Jean Ray… Il était donc temps de lire ce fameux Malpertuis, classique du fantastique… La postface nous a cependant permis de découvrir que, lecteurs de Harry Dickson, nous avions tout de même déjà eu l’occasion de « pratiquer » l’auteur…

Synopsis

Dans une mystérieuse demeure, appelée Malpertuis, l’oncle Cassave est mourant. Il rassemble une dernière fois ses proches, afin de leur livrer son testament : ils doivent tous venir s’installer à Malpertuis et y demeurer, jusqu’à ce que, la mort les emportant les uns après les autres, deux seulement demeurent, à qui l’ensemble de l’héritage reviendra.

Mais quelle est donc cette famille, qui sont donc ces figures mystérieuses qui gravitent autour du neveu de Cassave, Jean-Jacques ? Et quelles horreurs vivent dans les ombres de cette maison ?

Avis

Comment parler de ce livre sans révéler tout ou partie de la fin ? Car c’est bien dans la fin que réside toutes les clés de cette histoire… Après s’être perdu dans les méandres de l’histoire, après s’être demandé où l’auteur veut l’emmener, le lecteur finit en effet, à la fin, par rassembler les fils de l’histoire, et par rester un peu ébahi. « Comment me suis-je retrouvé là ? », voilà la question qui lui vient à l’esprit au moment de refermer ce livre…

Pourtant, en chemin, on peut douter. La construction de l’histoire est, comme le domaine de Malpertuis, labyrinthique. On s’y perd, on s’y égare, la même porte ne donne jamais accès à la même pièce. On hésite, on s’égare, on tremble de ce que l’on pourrait découvrir au bout de tel ou tel passage que l’on a pourtant emprunté cent fois sans surprise.

Chaque personnage semble tour à tour bizarre, curieux, étrange, menaçant, protecteur, brutal. Aucun point fixe auquel se raccrocher ne nous est proposé, accentuant encore la double sensation, d’étrangeté et de malaise.

Rajoutez à cela un texte érudit, non seulement dans ses sources – Jean Ray, visiblement, connait bien la mythologie, les religions, les mythes -, mais aussi dans son vocabulaire. Cryptogames, spagyrie, rudéral… il ne m’arrive pas si souvent que cela de devoir consulter un dictionnaire pour comprendre ce que je lis, mais voici quelques exemples pour lesquels il m’a fallu sacrifier à l’exercice.

On se sent comme une souris, ou un lapin, entre les griffes d’un félin, comme un humain pris dans les complots des dieux. La seule chose évidente, c’est que l’on ne parvient pas à percevoir la situation d’ensemble, que nous sommes chahutés par les vents sur une surface dont nous ne pouvons qu’essayer de deviner les contours. Tout tangue, tout est mouvant. Le seul élément probable, c’est l’inévitable aboutissement. Le destin ?

Est-ce que j’ai aimé ? Pas complètement. Mais, ce qui est certain, c’est que j’ai été emporté dans cette bourrasque, baladé comme un fétu de paille. Quel art de la construction, quel sens de l’articulation : on croirait un horloger organisant le mouvement de précision d’une montre, pour que chaque détail tombe précisément au bon endroit au bon moment. Il faut cependant être prêt à se laisser promener, ce n’est donc pas le livre que je choisirai pour faire découvrir le fantastique à un esprit cartésien… j’aurais trop peur de provoquer l’effet inverse de celui attendu…

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