Chronique de Le calendrier de l’après, de Nicolas Feuz.
« L’œil rouge du drone fixait Alexis. L’engin faisait du sur place à deux mètres de lui, à la hauteur de son visage, comme pour le défier en combat singulier. Si le canon se mettait à tirer, l’élu savait qu’il n’avait aucune chance. Il se souvenait de l’homme qui avait pris Adélaïde en otage. L’ADS l’avait aussitôt neutralisé. »
Nicolas Feuz, Le calendrier de l’après, Slatkine & Cie, 2020, p. 69.
Motivations initiales
Chez Ô Grimoire, nous suivons Nicolas Feuz depuis Le miroir des âmes, son premier roman paru aux éditions Slatkine & Cie, qui nous avaient proposé de le découvrir. Et nous avons pris goût aux aventures du procureur Jemsen. Et puis nous avons élargi aux autres romans de l’auteur, Horrora borrealis et Heresix. De passage à Quais du polar en juillet dernier, Nicolas Feuz était présent, occasion pour nous de repartir avec le plus récent, ce fameux Calendrier de l’après…
Synopsis
Alexis est l’un des élus. Comprenez l’un des fils d’Élise Marval, celle qui a travaillé sur le virus Verna et qui s’est retrouvée à mettre en place le nouveau pouvoir. Celle qui a défini les 11 commandements qui font désormais force de loi parmi les bien-pensants. Les élus – ses fils -, vivant chacun isolé dans un palais dans l’une des villes de la francophonie, fournissent le sperme qui permet de maintenir l’espèce, à peu près toutes les autres tâches étant accomplies par des femmes.
À l’occasion d’un incident – un paria de l’extérieur, un de ceux qu’on nomme les « inutiles », s’est introduit dans le palais -, Alexis rencontre Billie. Elle est milicienne, elle a à peu près son âge. Et ce qui devait arriver arriva : il tombe amoureux. Mais les relations sexuelles sont interdites ; toute proximité avec les élus est suspecte.
Alexis et Billie parviendront-ils à échapper aux contraintes pour vivre leur amour ?
Avis
Ce livre n’est pas réellement un roman policier, contrairement aux productions habituelles de Nicolas Feuz. Il s’agit davantage d’une dystopie, un roman d’anticipation dans lequel on montre comment une situation peut dériver – ici, comment une pandémie a fait s’effondrer l’organisation sociale que nous connaissons.
Et, en effet, la situation a dérivé. Une petite partie de la population est désormais protégée, mais aussi surveillée, encadrée, soumise à des règles strictes ; les « inutiles », eux, sont des parias, des laissés-pour-compte infréquentables.
On comprend bien – et c’est un thème qu’on retrouve dans plusieurs ouvrages de science-fiction – que la scission d’une population en deux blocs soulève toujours bien des questions. Comment s’opère le tri ? Sur quels critères ? Qui décide ? Jusqu’où peut-on aller pour protéger un petit groupe ?
Mais, et c’est tout l’intérêt de la dystopie, on se doute bien que l’isolement peut rapidement se traduire par une méconnaissance de l’autre, et donc par l’instauration d’une peur, qui finit par faire des clichés une vérité auto-proclamée. Et même si on n’observe ce phénomène que de manière très atténuée autour de la scission autour de la question du vaccin, on est bien obligés de noter que le phénomène n’est pas si éloigné. Il n’a heureusement pas la même intensité que dans ce Calendrier de l’après, mais cela aide tout de même à réfléchir…
C’est agréable à lire, un peu gore quand même – mais Nicolas Feuz aime bien ne pas nous épargner -, et en même temps, cela fait réfléchir. Qu’attendre de plus, de demander de mieux ? Rien ? Alors, n’attendez plus, attaquez-vous au Calendrier…
