Chronique de Soumise, de Christine Orban.
« Blaise et Jacqueline vivent ensemble, comme un couple. Aidés et surveillés à leur insu par Louise, ils se sont organisés une vie agréable, partagent le même goût pour l’étude, la lecture, la morale, la même vision du monde, ils ne font qu’un, sous le même toit. »
Christine Orban, Soumise, Éditions Albin Michel, 2022, p. 140.
Motivations initiales
Pour moi, Blaise Pascal ou René Descartes font partie de ces personnages énigmatiques et troublants à la fois par leur génie et par leur caractère exécrable et leur comportement égoïste. Alors souvent je craque sur un livre, une BD, un manga traitant de ces types de caractères. Quand j’ai lu la quatrième de couverture, impossible de résister : cette fois-ci, c’est donc à la fratrie Pascal que l’on s’intéresse !
Synopsis
La fratrie Pascal est composée de trois enfants – deux filles et un garçon. L’ainée, Gilberte, endosse le rôle de mère pour son frère et sa sœur. Elle tente d’adoucir leur quotidien par des gestes maternels et en donnant à la benjamine, Jacqueline, une éducation digne de ce nom. Blaise, qui occupe la place de cadet, est éduqué par le père. Très vite l’enfant fait preuve d’une intelligence impressionnante et d’un goût pour les mathématiques et la géométrie. Jacqueline, elle, est très à l’aise avec les mots et déclame des poèmes sans aucune hésitation. Entre adoration, compétition et soumission, la relation entre les deux prodiges est difficile à cerner et exclue les autres membres de la famille.
Avis
Voici un roman qui ne laisse pas de marbre tant par son côté poignant que révoltant.
Poignant, car on y découvre une relation basée sur l’exclusivité, l’admiration et la complicité, entre Blaise Pascal et sa jeune sœur Jacqueline. Frôlant parfois le côté incestueux, Christine Orban met en lumière un Blaise Pascal tantôt manipulateur, tantôt affectueux, débordant d’amour pour sa sœur. Ce qui révolte le lecteur – et surtout la lectrice – est, sans nul doute la dévotion – voire même la soumission, d’où le titre du livre – de Jacqueline pour Blaise. Elle le veille, s’occupe de lui comme le ferait une infirmière, mais fait également passer ses propres envies après celles de son frère.
Révoltant, car si l’un est un prodige des sciences, Jacqueline, elle, avait tout pour être une grande poétesse. Tout, sauf, comme le dira Manon Roland quelques années plus tard « je suis bien ennuyée d’être une femme : il me fallait une autre âme, ou un autre sexe, ou un autre siècle… ». Ici aussi, le masculin l’emporte sur le féminin et brise, une fois encore, le destin d’une femme. Jacqueline Pascal a donc faire taire son talent mais également son envie d’offrir sa vie à Dieu.
En tournant les pages de ce roman, on constate à quel point la relation entre eux deux a été déséquilibrée, fonctionnant à sens unique à l’avantage de Blaise Pascal. Poignant et révoltant, ce sont les deux mots qui définissent parfaitement cette lecture.
Un grand merci à Christine Orban pour ce travail de fond qui met en lumière une femme du Grand Siècle, oubliée de tous, et qui montre une fois encore que, derrière chaque grand homme, il y a une femme. À lire sans hésitation !
Pour en savoir plus
Retrouvez la présentation de ce livre sur le site de l’éditeur.
