Aventures, Fantasy

Capitale du Sud – T. 1 Le sang de la cité

Chronique de Capitale du Sud – T. 1 Le sang de la cité, de Guillaume Chamanadjian.

« Je me plongeai dans la masse grouillante de vie des ruelles avec plaisir, m’enivrai des odeurs des pâtisseries mêlées d’épices et d’herbes aromatiques. Les costumes bariolés d’une troupe de saltimbanques tranchaient avec la pierre rouge des murs de la Cité. Un histrion coiffé d’un turban m’apostropha : « Une pièce d’argent pour un conte en or, jeune homme ! » Je lui fis signe que je n’avais pas d’argent, mais il ne me regardait déjà plus. »

Guillaume Chamanadjian, Capitale du Sud – T. 1 Le sang de la cité, Le Livre de poche, 2023, p. 25.

Motivations initiales

Je suis toujours à la recherche de fantasy, mais sans qu’il s’agisse de pavés de 800 pages dont, une fois sur deux, on se dit qu’ils auraient été très bien… en 350 pages – ça peut être en plusieurs tomes, ça, ça ne me dérange pas. Ici, on était sur un format raisonnable. Et puis l’histoire avait l’air sympa, avec ce commis d’épicerie qui, dans un livre, retrouve comme des éléments de sa propre vie. Que valait donc cette série, Capitale du Sud, elle-même rattachée à un cycle, Le Cycle de la Tour de garde, dont Guillaume Chamanadjian assure la partie concernant la Capitale du Sud (des fois que ça n’aurait pas été clair), alors que Claire Duvivier se charge de ce qui touche à la Capitale du Nord ?

Synopsis

Nox – diminutif de Nohamux, ce qui, dans ce monde, semble être une des façon d’abréger les prénoms, puisque l’on voir également passer un Cax, je crois, diminutif de Casimux, de mémoire – est commis d’épicerie : il effectue des livraisons pour l’un des épiciers réputés de Gemina – la fameuse Capitale du Sud -, invente de nouvelles recettes, assure une partie des relations avec les fournisseurs… Mais, à ses heures perdues, il récite également des poèmes. Et il joue à la Tour de garde, une sorte de jeu d’échec – mais en plus complexe, semble-t-il -. Ce serait déjà pas mal pour un seul homme.

Pourtant, Nox n’est pas que cela. Il est également l’un des deux enfants que le duc de la Caouane a retrouvé dans les souterrains du château du duc du Souffleur et libéré de la geôle dans laquelle un frère, Nohamux, et sa sœur, Daphné, étaient retenus – sans que l’on sache pour quelle raison. Depuis, le duc de la Caouane suit, de loin – mais est-ce réellement de si loin – le devenir de l’enfant.

Quelles intrigues et quelles forces sont donc ici à l’œuvre ? Nohamux saura-t-il démêler les fils de cette histoire ?

Avis

Ce livre a reçu plusieurs prix, dont deux aux Imaginales – dont je rappelle que, au moment où sort cette chronique, on s’approche à grands pas ; rendez-vous à Épinal les 25 et 26 mai ! -. Évidemment, cela amène à entamer cette lecture plutôt en confiance. Et autant le dire tout de suite, j’ai effectivement adhéré à cette histoire, qui, tout en conservant une forme de classicisme, renouvelle assez efficacement le genre. J’ai retrouvé dans ce récit quelque chose du souffle d’un David Eddings dans Le pion blanc des présages, avec ce personnage de Nox qui, au début de ce livre, n’a aucune idée de ce qui va lui tomber dessus.

L’espèce de bouillonnement qui habite Nox est intéressant : on sent bien que tout cela le dépasse et, en même temps, comme lecteur ou lectrice, on sait bien qu’il ne va pas avoir d’autre choix que de s’en accommoder… ou de mourir (mais, dans ce cas, on ne lui aurait pas consacré un livre…).

Les différents personnages sont tous divertissants, complexes, on prend plaisir à les suivre dans les démêlés qui sont les leurs. Il y a des combats, du mystère voire un petit peu de magie, des intrigues et même (clin d’oeil à ceux qui se souviennent de The Princess bride) un peu d’amour ! Et tout cela fonctionne bien et donne envie de rapidement se procurer le tome 2, ce qui est toujours bon signe.

Il y a cependant, dans cette lecture, un point qui me chagrine. J’ai hésité à l’évoquer, mais je prends le risque de paraître « vieux jeu » ou « puriste ». À cinq reprises dans le livre, j’ai relevé des formulations qui me semblent fautives – et à double titre -. Quatre fois, ce sont des formulations avec « tandis que », et une fois avec « alors que ». Je vous les liste (il y en a une que je n’ai pas noté immédiatement et que je n’ai pas retrouvée, donc j’en liste quatre en tout), en les reprenant telles qu’elles figurent dans le livre :

« Et, tandis que nous parvînmes à quelques mètres de l’estrade, Servaint prit la parole » (p. 77)

« Les combattants se disposèrent en cercle, chacun tourné vers son duc, tandis que le silence se fit » (p. 328)

« Il s’arrêta en plein milieu de la grande salle tandis que le vide se fit autour de lui » (p. 354)

« L’odeur de brûlé me prit à la gorge alors que nous déboulâmes sur la rue des Galigeais » (p. 386)

À l’oreille, j’aurais attendu « tandis que nous parvenions », « tandis que le silence se faisait », « tandis que le vide se faisait », « alors que nous déboulions ». Et, du point de vue du sens, il me semble que dans ces quatre phrases, l’imparfait serait plus adapté, les actions décrites ayant une certaine durée, mais qui n’est pas clairement délimitée. J’aurais compris « Quand nous parvînmes à quelques mètres de l’estrade, Servaint prit la parole », « et le silence (le vide) se fit », et « L’odeur de brûlé me prit à la gorge lorsque nous déboulâmes… ». En tout cas, ce sont de ces moments où ma lecture a été interrompue par ce truc qui grinçait. Le cas échéant, n’hésitez pas, en commentaire, à me dire que vous n’êtes pas d’accord, évidemment !

Bon, cela n’a pas non plus coupé mon élan. Mais j’ai trouvé curieux que cela n’ait pas été corrigé par l’éditeur ; peut-être, après tout, y a-t-il eu un échange sur le sujet et l’auteur a-t-il souhaité un effet de style.

Quoi qu’il en soit, je le redis : l’histoire est attrayante, j’ai hâte d’en découvrir la suite et de percer à jour certains des mystères de Gemina… Et vous, êtes-vous prêts à venir goûter le vin de la Poivrière-du-Coq, les cannelons à la fègue et les gâteaux au miel et aux amandes d’Eustaine ? Si c’est le cas, n’oubliez pas de prendre avec vous vos figurines de la Tour de garde, surtout si vous en avez une de la Demoiselle…

Pour en savoir plus

Retrouvez la présentation de ce livre sur le site de l’éditeur.

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