Drame, Roman, Roman noir

Orange Crush

Chronique de Orange Crush, de Tim Dorsey.

« Escrow était un jeune homme bien propre d’un mètre quatre-vingt-huit. Il avait le visage enfantin, le petit polo et le regard en trou de vrille du missionnaire qui fait du porte-à-porte. Sa conception du monde n’avait pas évolué d’un iota depuis qu’il avait quatorze ans et qu’il écoutait son père, assis à la table familiale. »

Tim Dorsey, Orange Crush, Rivages, 2013, p. 87.

Motivations initiales

Ce livre est un cadeau, occasion de découvrir un auteur, Tim Dorsey, et dans une collection, Rivages / Noir, qui est en général au top. Bref, que de bonnes ondes au moment de commencer cette lecture !

Synopsis

Marlon Conrad est un fils à papa, devenu gouverneur de Floride un peu par hasard, mais essentiellement grâce aux intrigues et aux gros sous de papa, Dempsey Conrad et de ses « amis ». Les amis en question, ce sont tous les milliardaires du coin, Monsieur Tabac, Monsieur Sucre, Monsieur Pétrole, Monsieur Assurance, Monsieur Location-de-voitures, représentés par leurs lobbyistes, et qui arrosent allègrement tout ce petit milieu…

Mais un petit grain de sable vient faire grincer la belle mécanique : Marlon Conrad a oublié d’effectuer son service national, et cela risque de lui exploser entre les doigts. Sur les conseils insistants de son père, il s’engage dans la réserve… mais, manque de chance, cela correspond au moment où la guerre des Balkans se déclenche. Et voilà le pauvre petit garçon riche, promis à une belle carrière politique, projeté, avec d’autres américains qui, eux, n’ont véritablement pas eu le choix, au Kosovo.

Mais là, le miracle se produit. Après avoir consciencieusement évité les autres types de sa brigade, il se lie d’amitié avec l’un d’entre eux, qui lui fait en réalité découvrir la vie, l’honneur, le dévouement… la camaraderie, quoi ! Pratiquement le seul à rentrer vivant aux États-Unis, Marlon fait le tour des familles de tous les membres du groupe, ce qui constitue une révélation pour ce Républicain bon teint.

Dès lors, sa campagne pour se faire réélire comme gouverneur prend une tournure inattendue. Et le voilà finalement lancé dans un grand tour de Floride, en mode road-movie, avec une belle équipe de vainqueurs…

Avis

Ce livre est écrit au deuxième degré ; il faut donc le lire au troisième ! Chaque personnage est outré, les méchants sont vraiment immondes ; les gentils… ah, ben en réalité, il n’y a pas de vrai gentil dans cette histoire ; la plupart des personnages se débattent comme ils peuvent avec leur vie, et, comme béquilles, s’appuient souvent sur l’alcool ou la drogue.

Mais, au travers de ce tissu d’outrance, c’est une Amérique qui parait assez crédible qui nous est dépeinte. Certes, le trait est poussé loin, mais le fait que les plus riches soient copieusement arrosés par des lobbyistes qui poussent les intérêts (financiers) de leurs employeurs… c’est crédible. Ce candidat démocrate, adversaire, donc, de Marlon Conrad, qui semble essentiellement faible, mais qui est poussé par une femme qui se voit bien en première dame de Floride, il est assez crédible. Ce troisième candidat dont le principal slogan consiste à déclarer qu’il « voit rouge foncé », il ne vous rappelle pas la vraie vie ?

Rien n’est crédible, y compris le fait que trois ou quatre personnages semblent suivre Marlon avec l’unique intention de l’abattre d’une balle dans la tête, mais, en réalité…

Et ça fait de l’ensemble un concentré de vraie vie, qui aborde beaucoup de problématiques – les abus du capitalisme, l’oppression des femmes, la peine de mort, la présomption d’innocence… – très actuelles. L’idée est déjantée – un gouverneur républicain qui découvre les valeurs du partage et de la solidarité -, le traitement est déjanté – jusqu’au dernier « meeting » très à l’américaine, grand show, avec tous les marqueurs qui font que l’on adore détester les américains -, mais, au final, ce que l’auteur nous livre est crédible, à l’outrance près. Je ne sais pas très bien comment l’exprimer mieux…

Alors, est-ce que vous seriez près à vous embarquer à bord de ce camping-car appelé Orange Crush parce qu’il a précédemment été employé, à des fins publicitaires, par une marque de jus de fruits – je dis ça de mémoire, mais je crois que ce sont des jus – ?

Pour en savoir plus

Retrouvez la présentation de ce livre sur le site de l’éditeur.

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