Historiques, Roman

La fabrique des souvenirs

Chronique de La fabrique des souvenirs, de Clélia Renucci.

« Dans son désespoir, il s’en était persuadé, tant que la mort d’Oriane ne serait révélée à personne, elle resterait en vie. Le désir de découvrir de nouveaux souvenirs se rattachant à elle et aux camps l’obsédait. Si sa conscience se refusait à accepter la vérité, son inconscient, lui, n’en doutait plus et c’était la raison pour laquelle son équilibre mental vacillait. Instable, il souffrait sans répit. »

Clélia Renucci, La fabrique des souvenirs, Éditions Albin Michel, 2021, p. 236.

Motivations initiales

J’avais apprécié le précédent roman de l’auteur – Concours pour le Paradis – alors forcément quand j’ai eu la possibilité de l’avoir en avant première je n’ai pas hésité !

Synopsis

Dans les années 90, un projet assez audacieux – MemoryProject – a vu le jour. Le concept est simple, chaque fait quotidien est immortalisé, les souvenirs sont collectés, conservés et ensuite consommés par les autres.

Pour son travail, Gabriel court les salles de vente pour acquérir des souvenirs liés à la culture. Il acquiert un souvenir concernant la première représentation de Phèdre à la Comédie Française en 1942. Ses sens sont tous stimulés et en éveil, il tombe amoureux d’une spectatrice dont il ne voit que la nuque.

S’engage alors une véritable enquête pour trouver l’identité de cette inconnue et retracer son histoire. Dans cette longue et intense quête, Gabriel va se consumer d’amour pour cette inconnue.

Avis

Le premier roman de Clélia Renucci, absolument brillant, nous entrainait en pleine période de la Renaissance à Venise pour une bataille – aujourd’hui, on dirait un battle – entre les plus grands peintres italiens de l’époque. Imaginez donc à quel point la barre était haute lorsque j’ai entamé la lecture du nouveau roman de l’auteure. 

Clélia Renucci embarque son lecteur dans une histoire un peu folle, celle d’un projet destiné à immortaliser et conserver les souvenirs. Ces souvenirs sont ensuite vendus au plus offrant. Pour ma part, je trouve une telle idée absolument angoissante. Et au rythme auquel notre monde avance, le pire, c’est que dans quelques années ce sera peut-être possible !

Ici, on plonge dans le monde des artistes et du théâtre – lors de la première représentation de Phèdre à la Comédie Française -… alors qu’à l’extérieur du théâtre, c’est la guerre avec tout son chapelet d’horreurs, de brutalités. Un cadre éminemment paradoxal, un cocon dans un monde de violence, qui génère une impression d’étrangeté, de parenthèse. Et si l’on se sent protégés, on sait que, dehors, le danger rôde.

C’est profondément romantique, c’est vibrant, ça sent la nostalgie. Cette belle balade dans les entrailles du théâtre qui confirme le talent de Clélia Renucci ! Elle maitrise à la perfection l’art de nous faire passer d’une époque à l’autre, de jongler avec les personnages sans jamais nous lâcher la main pour qu’on n’en perde pas une miette !

Alors, vous prenez une place au balcon ? 

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