L’oiseau occupe une place à part, du point de vue des humains. Il est celui qui vole, qui est proche des cieux, qui est entre le ciel et la terre. En cela, il s’oppose au serpent qui, ancré dans la terre, incarne le monde terrestre. Par leur légèreté, les oiseaux symbolisent les états spirituels, ce sont des messagers du ciel. Dans la littérature chinoise, on retrouve souvent la figure de l’oiseau bleu qui est en réalité une fée ou un messager céleste. C’est d’ailleurs cette même idée que l’on retrouve dans la Rome antique, où le vol et le chant des oiseaux est interprété comme présage, comme auspice.
Chez les Celtes, l’oiseau est un messager des dieux. Rhiannon, la déesse galloise, est accompagnée par des oiseaux, qui sont chargés de réveiller les morts mais également d’endormir les vivants – probablement du dernier sommeil – ! On retrouve également une divinité aux oiseaux chez les Gaulois, et les dieux germaniques, Odhinn et Wotan, ont eux aussi leurs oiseaux. Et, chez les indiens Hopi, les oiseaux ont le pouvoir de parler avec les dieux.
Chez les Egyptiens, un homme- ou une femme-oiseau était la représentation soit de l’âme d’un d’un défunt, soit d’un dieu venu visiter la terre.
On retrouve d’ailleurs cette dimension d’intercession avec l’arbre. Or quel est le principal animal que l’on retrouve perché sur les arbres ? Justement, l’oiseau ! Et cette position sacrée, intermédiaire entre les ciel – et donc les dieux – et la terre – et les hommes – est très ancienne, puisque l’on retrouve déjà, des dessins préhistoriques représentant des hommes-oiseaux (dans les grottes de Lascaux ou d’Alta-Mira, par exemple), représentation, probablement, de l’âme, de l’intelligence, des fonctions intellectuelles. Chez les Yakoutes, les âmes des morts deviennent des oiseaux.
Dans la symbolique médiévale également, l’oiseau est un « signe d’ordre spirituel ; il désigne l’âme », comme l’indique Marie-Madeleine Davy, dans Initiation à la symbolique romane (XIIe siècle), paru en 1977 chez Flammarion.
L’art africain fait une large place aux oiseaux, notamment sur les masques. Il est alors symbole de vie, de puissance, de fécondité. Chez les Bambaras, ce sont les oiseaux qui ont fait don aux hommes de la parole
Mais il arrive que l’oiseau soit « emporté » par sa légèreté. C’est alors une représentation de l’imagination débridée, de l’instabilité, de l’absence de méthode. On en retrouve une expression dans le Tao, qui représente les barbares sous la forme d’oiseaux, spontanés, violents, bruts. Toujours en Chine, d’ailleurs, le chaos est souvent représenté sous la forme d’un oiseau rouge et jaune.
Naturellement, on attribue ensuite des significations différentes aux différents types d’oiseau : la colombe représente la paix, la vie contemplative, le moine, alors que le faucon incarne la noblesse, l’action. Le corbeau, au contraire, avec son plumage noir, est très vite considéré comme égoïste, infidèle, maléfique. Les hiboux et les chouettes sont l’incarnation de la sagesse, de la magie. On pourrait décliner les différents types d’oiseau à l’infini, mais on se contentera, pour finir, d’évoquer le phénix, débordant de la force vitale du feu qui le consume afin qu’il renaisse de ses cendres…
Les oiseaux dans nos lectures
Preuve qu’il est un animal fortement symbolique, l’oiseau est fréquemment utilisé par les poètes : les gerfauts de José Maria de Heredia représentent les conquistadors espagnols avides d’or ; l’albatros, chez Baudelaire, incarne le poète, malhabile dans la vie quotidienne, mais tellement noble dans ses envolées lyriques ; le cygne prisonnier des glaces chez Mallarmé…
Dans les contes également, on retrouve de nombreux oiseaux : des cygnes, dans Les cygnes sauvages d’Andersen et plusieurs variantes sur ce thème ; les oies sauvages qu’accompagne Nils Holgersson ; l’Oiseau bleu…
On le retrouve évidemment sous de très nombreuses formes dans tous les types de littérature. On peut ainsi penser aux grands aigles chez Tolkien – Gwaihir ! -, à Hedwige, la chouette de Harry Potter, mais également à Fumseck, le phénix de Dumbledore. Et puis, pour le clin d’oeil, n’oublions pas que, dans Les poisons de Katharz, Audrey Alwett n’hésite pas à sacrifier le faucon, familier d’un apprenti de Dame Carasse – sacrifié également, mais, de toute façon, « Cet apprenti était un con »…
Rien que dans les titres de très nombreux livres, on retrouve nos oiseaux. Le premier aigle, de Tony Hillerman. L’Île des chasseurs d’oiseaux, de Peter May. Le rêve d’un aigle foudroyé, de George Chesbro. Little bird, de Craig Johnson.
Vieux souvenir également, Le faucon déniché de Jean-Côme Noguès, dans lequel Martin, un jeune serf, trouve un oisillon, qu’il va élever, malgré les lois de l’époque. Un hymne à la liberté, à l’insouciance, aussi…
Côté BD, on pense également à la série Undertaker, dont le personnage central, croque-morts, a recueilli un vautour. Le symbole est évident, mais il fonctionne, et c’est bien là l’essentiel.
Et vous, de quels « oiseaux de papier » – ou de celluloïd – vous souvenez-vous ? Les corbeaux mangeurs d’yeux du Hussard sur le toit ? La folie de Birdy ? Les oiseaux du film éponyme ?